Le mandat de protection future

L’ORGANISATION D’UNE INCAPACITÉ

L’espérance de vie ne cessant de s’allonger, il n’est pas rare que les « patriarches » perdent leurs capacités intellectuelles et physiques, plongeant ainsi leur famille dans une situation difficile à gérer.

Face à une telle situation, la tutelle et la curatelle ne sont pas les seules options. Vous pouvez désormais organiser vous-même votre incapacité future, tout en conservant vos pouvoirs et votre capacité juridique.

Vous pouvez également prendre des dispositions pour la protection de votre enfant malade ou souffrant d’un handicap, pour le jour où vous ne pourrez plus l’assumer vous-même.

LE MANDAT DE PROTECTION FUTURE POUR SOI-MÊME

Définition du mandat de protection future
C’est un contrat qui vous permet d’organiser à l’avance la protection de votre personne et de vos biens en désignant la ou les personnes qui en seront chargées, pour le jour où votre état de santé ne vous permettra plus de le faire vous-même.

Le mandat de protection future ne peut prendre effet que s’il est médicalement établi que vous ne pouvez plus pourvoir seul à vos intérêts, par suite de l’altération de vos facultés mentales ou physiques.

SIGNATURE DU MANDAT

Vous ne pouvez signer ce mandat que si vous n’êtes pas placé sous tutelle ou, si vous êtes placé sous curatelle, qu’avec l’assistance de votre curateur.

ETENDUE DU MANDAT

Vous pouvez confier la défense des actes relatifs à votre personne à un mandataire, et ceux relatifs à la défense de votre patrimoine à un autre, ou les deux à la même personne.

Protection de votre personne : elle porte sur l’ensemble des questions relatives à votre vie personnelle, votre santé, vos relations aux autres, votre logement, vos déplacements, vos loisirs, etc.

Protection de votre patrimoine : il est possible de la limiter cette protection à certains biens comme de l’étendre à l’ensemble des biens.
Les pouvoirs du mandataire peuvent être limités aux actes d’administration (de gestion) des biens, mais aussi être étendus aux actes de disposition (vente). Dans le second cas, il est possible d’exclure le pouvoir de disposition du mandataire quant à votre logement, afin d’assurer le maintien de votre cadre de vie.

FORME DU MANDAT DE PROTECTION FUTURE

Le mandat peut être sous seing privé si les pouvoirs du mandataire sont limités aux actes de conservation et d’administration des biens.

En revanche, il doit être authentique si vous souhaitez confier au mandataire des pouvoirs de disposition.

La ou les personnes que vous aurez désignée(s) doit(vent) indiquer expressément sur le mandat qu’elle(s) l’accepte(nt).

DÉSIGNATION DU MANDATAIRE

Vous pouvez désigner toute personne de confiance.

Il ne peut s’agir pour l’instant que d’une personne physique.

DATE DU MANDAT

Si vous choisissez la forme authentique, votre mandat a automatiquement date certaine, c’est-à-dire qu’elle ne peut pas être contestée.

Si vous établissez votre mandat sous seing privé, il est recommandé de le faire enregistrer par l’administration fiscale en présentant les exemplaires originaux du mandat à la recette des impôts de votre domicile.

MISE EN OEUVRE DU MANDAT

Tant que vous conservez votre capacité à défendre seul vos intérêts, le mandat ne produit aucun effet.
Lorsque le mandataire constate que votre état de santé ne vous permet plus de prendre soin de votre personne ou de vous occuper de vos affaires, il effectue les démarches nécessaires pour que le mandat prenne effet.
Il sollicite alors qu’un médecin, inscrit sur la liste dressée par le procureur de la République, vous examine et délivre un certificat médical constatant votre inaptitude.
Le mandataire va ensuite présenter le mandat et le certificat médical au greffe du tribunal d’instance de votre domicile. Le greffier vérifiera que les conditions prévues par la loi sont remplies et que le mandat est accompagné des pièces requises puis apposera son visa sur le mandat et le restituera au mandataire.

EFFETS DU MANDAT

Le mandat ne vous fait perdre ni vos droits ni votre capacité juridique, mais permet à votre mandataire d’agir à votre place et en votre nom dans votre intérêt.

Ce mandat fonctionne comme une procuration : le mandataire vous représente et veille à vos intérêts dans les actes relatifs à votre personne et à votre patrimoine, le tout dans les limites fixées par le mandat.

Si un acte de disposition, ou un acte non prévu par le mandat, apparaît nécessaire, votre mandataire peut demander au juge des tutelles de l’autoriser.

En pratique, le mandataire présente le mandat aux tiers pour agir en votre nom chaque fois que cela est nécessaire. Mais vous conservez la capacité d’accomplir vous-même ces actes si vous le souhaitez et dans la mesure où votre état de santé le permet.

Si votre état vous permet de le comprendre, votre mandataire doit vous informer des actes qu’il diligente en votre nom.

Il doit également vous rendre compte tous les ans de la gestion de votre patrimoine.

CONTRÔLE DU MANDAT

Si le mandat est sous seing privé, vous devrez désigner une personne qui contrôlera l’action de votre mandataire. Il peut s’agir d’une personne physique ou morale de votre choix.
Cette personne doit accepter la mission qui lui est confiée et recevoir une copie du mandat.

Si le mandat est notarié,le notaire signataire de l’acte aura un devoir de contrôle. Il pourra signaler au juge des tutelles tout acte du mandataire contraire à votre intérêt.

En cas de difficulté, le notaire, ou toute personne, y compris vous-même, peut saisir le juge des tutelles. Celui-ci a le pouvoir de contrôler, de compléter ou même de révoquer le mandat s’il l’estime insuffisant ou contraire à vos intérêts.

OBLIGATIONS DU MANDATAIRE

  • Exécuter sa mission conformément aux dispositions du mandat, et plus globalement du code civil.
  • La responsabilité de votre mandataire peut être mise en cause en cas de mauvaise exécution, d’insuffisance ou de faute dans l’exercice de sa mission. S’il est reconnu responsable d’un préjudice à votre égard, il peut être condamné à vous indemniser.
  • Etablir un inventaire de votre patrimoine lors de la mise en oeuvre du mandat.
  • Rendre compte annuellement de sa mission, soit auprès du notaire signataire de l’acte, soit à la personne désignée dans le mandat pour contrôler sa mission.

Le mandataire établit chaque année :

  • Un rapport écrit sur les actes liés à la protection de votre personne (santé, logement, relations avec les tiers) ;
  • Un compte rendu de la gestion de votre patrimoine (utilisation des revenus, actes d’administration des biens) ;
  • Un inventaire actualisé des biens composant votre patrimoine.

Le mandataire a l’obligation de conserver, pour les cinq derniers comptes de gestion annuels, l’inventaire et ses actualisations ainsi que les pièces justificatives, qu’il devra vous remettre lorsque vous aurez retrouvé vos facultés afin que vous puissiez reprendre en main la gestion de vos biens et de votre vie personnelle.
A défaut de recouvrement de vos facultés ou en cas de décès, ces documents seront remis à la nouvelle personne qui assurera votre protection ou à vos héritiers afin de faciliter le règlement de votre succession.

RESPONSABILITÉ DU MANDATAIRE

Votre mandataire peut confier un ou plusieurs actes déterminés de gestion du patrimoine à un tiers (si vous l’y autorisez dans le mandat) ; en ce cas il doit vous en informer, et il sera responsable des actes effectués par ce tiers.

La responsabilité de votre mandataire peut être mise en cause en cas de mauvaise exécution, d’insuffisance ou de faute dans l’exercice de sa mission (articles 1991 et 1992 du code civil). S’il est reconnu responsable d’un préjudice à votre égard, il peut être condamné à vous indemniser.

RÉMUNÉRATION DU MANDATAIRE ET DES PERSONNES CHARGÉES DE SON CONTRÔLE

En principe, le mandat de protection future s’exerce à titre gratuit. Vous pouvez cependant prévoir dans le mandat une rémunération ou une indemnisation de votre mandataire ainsi que de la personne chargée du contrôle de l’exécution du mandat.

MODIFICATION ET FIN DU MANDAT

Tant qu’il n’a pas été mis en oeuvre :

  • Vous pouvez à tout moment modifier le mandat ou le révoquer ;
  • Le mandataire et la personne chargée de son contrôle peuvent renoncer à leur mission.

Une fois le mandat mis en oeuvre :

  • Vous ne pouvez plus le révoquer vous-même mais seulement sur autorisation du juge des tutelles ;
  • Le mandataire et la personne chargée du contrôle de l’exécution du mandat ne peuvent plus renoncer à leur mission eux-mêmes, mais ils peuvent demander au juge des tutelles d’en être déchargés ;
  • Tout intéressé peut contester la mise en oeuvre du mandat devant le juge des tutelles, qui mettre fin au mandat ;
  • Si vous retrouvez vos facultés, le mandataire devra faire viser par le greffe du tribunal le certificat médical qui en justifie. Il sera alors mis fin à votre mandat de protection future, sans autre formalité.

COÛT DU MANDAT

Etablissement du mandat :

  • Enregistrement du mandat à la recette des impôts : 125  ;
  • Frais, débours et émoluments : environ 200  ;
  • Honoraires : variables en fonction du temps passé, de la complexité de la situation et de vos souhaits de rédaction. Mise en oeuvre du mandat :
  • Certificat médical constatant l’altération de vos facultés ;
  • Apposition du visa par le greffe du tribunal d’instance : gratuit.

Exécution du mandat : en principe, le mandat de protection future s’exerce à titre gratuit. Vous pouvez cependant prévoir dans le mandat une rémunération ou une indemnisation de votre mandataire ainsi que de la personne chargée du contrôle de l’exécution du mandat.

LE MANDAT DE PROTECTION FUTURE POUR SON ENFANT

Le mandat pour la protection de votre enfant malade ou souffrant d’un handicap prend effet après votre décès et une fois qu’il a été médicalement constaté qu’il ne pourra pas pourvoir seul à ses intérêts, par suite de l’altération de ses facultés mentales ou physiques.

Il peut prendre effet avant votre décès s’il est médicalement établi que vous ne pouvez plus pourvoir seul aux intérêts de votre enfant, par suite de l’altération de vos facultés mentales ou physiques, et que votre enfant n’est pas non plus en mesure de pourvoir seul à ses intérêts en raison de l’altération de ses propres facultés.

Le mandat établi en vue de la protection de son enfant doit obligatoirement être notarié. Pour le reste, il obéit aux mêmes règles que le mandat pour soi-même.