Assurance-vie et régime de communauté

Une réponse ministérielle « BACQUET » en date du 29 juin 2010 est revenue sur les règles applicables au traitement fiscal des contrats d’assurance-vie non dénoués souscrits à l’aide de fonds communs.

L’HYPOTHÈSE EST LA SUIVANTE :

Un époux commun en biens a souscrit un contrat d’assurance-vie à l’aide de fonds communs (par exemple ses salaires). Son conjoint décède en premier. Ce contrat n’est donc pas dénoué.

TRAITEMENT CIVIL :

Depuis un arrêt rendu par la première chambre civile de la Cour de cassation le 31 mars 1992, la valeur de rachat du contrat souscrit par le conjoint survivant doit être ajoutée à l’actif de communauté et viendra donc augmenter l’actif de succession.

CONSÉQUENCES FISCALES :

Depuis la réponse ministérielle du 29 juin 2010, la moitié (1/2) de la valeur de rachat de ce contrat non dénoué est soumis aux droits de succession.

Cette solution est sans incidence pour la fraction de la succession revenant au conjoint survivant (le souscripteur du contrat), puisqu’il est exonéré de droits de succession.

Elle pénalise en revanche les autres héritiers, notamment les enfants, qui devront acquitter des droits de succession sur un capital qu’ils ne perçoivent pas puisque le contrat n’est pas dénoué.

Exemple : Contrat souscrit par le conjoint survivant de 200.000 

La moitié, soit 100.000 , est réintégrée dans le patrimoine successoral taxable. Si les enfants reçoivent la nue-propriété et que le conjoint est âgé entre 71 et 81 ans, 70.000  seront taxables aux droits de succession.

Mesures pouvant être envisagées :

AMÉNAGEMENT DU RÉGIME MATRIMONIAL

  • par la stipulation d’une clause préciputaire sur le contrat d’assurance-vie et d’une dispense de récompense lorsque le conjoint n’est pas l’unique bénéficiaire du contrat (cette précaution étant a priori inutile lorsque la clause bénéficiaire est démembrée entre le conjoint du souscripteur et leurs enfants).

OU

    • par l’adoption d’un régime de communauté universelle avec clause d’attribution intégrale au conjoint survivant.

Dans les deux cas, il conviendra de dispenser de récompense les époux et la communauté.

SOUSCRIPTION CONJOINTE D’UN CONTRAT AVEC DÉNOUEMENT AU PREMIER DÉCÈS

et désignation du conjoint survivant comme bénéficiaire en pleine propriété ou en démembrement avec les enfants.

Ainsi, le décès de n’importe lequel des deux époux co-souscripteurs entraîne à la fois la dissolution de la communauté et le dénouement du contrat, lequel n’entre donc pas dans l’actif successoral de l’époux prédécédé.

Cette solution est déconseillée en présence d’un contrat préexistant. 
En effet, elle implique de faire un rachat total de ce contrat pour replacer les fonds sur un nouveau contrat co-souscrit par les deux époux, entraînant ainsi :

  • la perte de l’antériorité fiscale dont bénéficiait le contrat racheté ;

et

  • une imposition plus ou moins élevée en fonction de la valeur de rachat et de la durée de vie du contrat.

SOUSCRIPTION DE CONTRATS « SYMÉTRIQUES » PAR CHACUN DES ÉPOUX,

c’est-à-dire distincts mais souscrits en même temps, avec le versement de primes initiales du même montant et alimentés de la même façon.
Ainsi, au décès du premier époux, la moitié de la valeur de rachat du contrat souscrit par son conjoint survivant lui revenant se compensera avec la récompense dont il sera redevable à la communauté au titre de la souscription de son propre contrat.

Cette solution implique toutefois que les bénéficiaires des contrats ne soient pas les époux. En effet, lorsque le bénéficiaire d’un contrat d’assurance-vie souscrit à l’aide de fonds communs est le conjoint du souscripteur, celui-ci ne doit pas de récompense à la communauté (article L. 132-16 du code des assurances).

Exemple :
Madame avait souscrit un contrat d’assurance-vie au moyen de deniers communs pour 1M .
Monsieur avait également souscrit un contrat d’assurance-vie au moyen de deniers communs pour 1M .
Les deux époux ont désigné comme bénéficiaires leurs enfants.
Mr décède en premier.

Le capital versé aux bénéficiaires s’élève à 1M .
Figure au passif de la succession de Monsieur une récompense de 1M  envers la communauté. L’actif de communauté comprend cette récompense de 1M  et la valeur de rachat du contrat de Madame également de 1M . L’actif de communauté est donc, dans notre exemple, de 2 000 000 .

La succession de Monsieur comprend à son actif la moitié du boni de communauté, soit 1M , et au passif une récompense envers la communauté d’égal montant. L’actif net de succession est donc nul.